Reconstruction nasale assistée par impression 3D
Chef de clinique dans le service de chirurgie plastique, esthétique et reconstructrice du CHU de Poitiers, le Dr Antoine Julienne[1] s’intéresse depuis toujours aux nouvelles technologies qu’il utilise depuis son plus jeune âge. Au gré de ses différentes expériences et rencontres professionnelles, il s’est conforté dans l’idée qu’elles pouvaient constituer un apport précieux non seulement pour ses activités chirurgicales mais également pour d’autres spécialités médicales. Il y a plus d’un mois maintenant, il a mis à profit ses compétences en modélisation et en impression 3D pour une patiente du site de Montmorillon souffrant d’une amputation nasale partielle. Le nez étant fait de cartilage pour la forme et de peau, le Dr Julienne décide de procéder à une reconstruction nasale à partir d’un cartilage prélevé derrière l’oreille de la patiente recouvert d’un lambeau de peau. Pour reconstruire à l’identique la partie du nez touché, le Dr Julienne a utilisé les images d’un scanner de la patiente pour modéliser et constituer le nez en image tri-dimensionnelle à partir de laquelle, il a imprimé le nez en plastique celui-ci constituant une version évidée du nez, un moule en somme. Le plastique du matériel ne pouvant être soumis à une stérilisation en autoclave, il a été enveloppé de papier film stérile. Le jour de l’opération, en positionnant au préalable le cartilage et le lambeau de peau dans le moule, le spécialiste les a déposés du premier coup à l’endroit exact du nez de la patiente. Résultat : une architecture nasale totalement respectée. « J’ai pu conformer son cartilage exactement dans la forme que je voulais grâce à l’impression 3D afin qu’il se rapproche le plus possible de son ancien nez », précise le Dr Julienne. En favorisant la précision, le nez 3D a réduit la durée de l’intervention qui a été faite en chirurgie ambulatoire.
Développer l’utilisation de l’impression 3D à l’hôpital
L’utilisation de l’impression 3D est très récente au CHU de Poitiers. Mais jusqu’alors, la modélisation et l’impression étaient faites par des prestataires externes. La performance du Dr Julienne réside dans le fait qu’il ait tout fait lui-même ou aidé par d’autres spécialistes, au sein de l’hôpital, depuis l’acquisition des données, en passant par la modélisation jusqu’à l’impression. Conscient que l’impression 3D fait partie des grandes révolutions futures, au même titre que l’intelligence artificielle, il participera à un projet mené par le laboratoire d’anatomie du CHU de Poitiers et les Usines nouvelles à Ligugé(86), financé par la région Nouvelle-Aquitaine s’il est accepté. « Les applications de l’impression 3D en milieux hospitalier sont extrêmement nombreuses », précise-t-il. Le financement de 10 000 euros permettra d’acheter une imprimante 3D performante et de former les internes ou médecins volontaires. L’objectif est d’imprimer du matériel biocompatible qui réponde aux normes CE et qui puisse être utilisé dans les blocs opératoires sans risque. En plus de la précision et de la diminution du temps opératoire, le Dr Julienne insiste sur les multiples avantages de l’impression 3D: « elle permet de diminuer le nombre d’intermédiaires dans la chaîne de production, de diminuer les coûts de production, d’augmenter la flexibilité entre la demande et l’impression, de diminuer la consommation de matière première, etc. »
[1] Après sa formation en médecine à l’université de Bordeaux, Antoine Julienne est venu à Poitiers pour y faire son internat. Il a obtenu un diplôme universitaire en techniques chirurgicales de reconstruction. Depuis le 1er novembre 2020, il est chef de clinique dans le service de chirurgie plastique, esthétique et reconstructrice du CHU de Poitiers. « La chirurgie reconstructrice m’intéresse non seulement pour son aspect technique mais également pour son aspect artistique », explique le spécialiste.
